L’interculturalité en neuropsychologie : quel impact sur notre pratique ?
Date de création
: 10/2018
Orateurs
: Yannick GOUNDEN
De par l’histoire migratoire de la France, l’étendue de ses territoires d’Outre-Mer et le contexte actuel de mondialisation, la prise en compte de la dimension culturelle dans la pratique de la neuropsychologie clinique est une urgence éthique. Toutefois, le développement d’un savoir-faire et d’un savoir-être adaptés aux problématiques que posent la diversité culturelle peine à émerger en France. Selon deux récentes études, la dimension interculturelle est peu ou pas prise en compte lors de la formation universitaire des futurs psychologues spécialisés en neuropsychologie (Gounden, Pérodeau, et Haudry-Gounden, 2018 ; Kokou-Kpoloua, Moukoutab, et Baugnet, 2017). En ce qui concerne la recherche scientifique, les travaux existants ont pour la plupart priorisés la normalisation ou la création d’outils psychométriques adaptés à des minorités ethniques de la société française (par exemples, Maillet et al., 2016 ; 2017 ; Noel, Dumez, Recher, Luyat et Dujardin, 2014). Outre la nécessité réelle d’avoir des tests appropriés, les outils à eux seuls ne sont pas suffisants pour une évaluation neuropsychologique qui soit culturellement adaptée (Fujii, 2017 ; Gounden et al., 2018). Quelques travaux francophones (articles et chapitres dans des manuels de neuropsychologie) peuvent aider les psychologues dans leur réflexion sur le lien entre culture et cognition (par exemples, Adam et al., 2017 ; Amieva, Belin, et Maillet, 2016 ; Colombo-Thuillard, et Annoni, 2014 ; Er-Rafiqi, Roukoz, Le Gall, et Roy, 2017 ; Ergis, Belin, Targe, Grenand, et Grenand, 2016 ; Lecerf, 2014 ; Marquet, Missotten, Schroyen, Nindaba, et Adam ,2016 ; Seron et Van Der Linden, 2014). Cependant, contrairement à certains pays anglo-saxons où il existe de nombreux ouvrages pour guider le psychologue dans la réalisation d’un bilan neuropsychologique auprès d’une personne de culture différente (Fujii, 2017), il n’existe, à notre connaissance, aucun support de cette nature en France pour aider le psychologue lors de ce type d’évaluation. Dans la pratique clinique, le psychologue va, de manière générale, adapter l’évaluation et nuancer l’interprétation des scores aux différents tests selon le niveau de français de son patient. La prise en compte de la maitrise ou non du français est évidemment nécessaire mais reste insuffisante pour le bon déroulement de cette évaluation. La recherche d’informations sur les dimensions culturelles qui caractérisent une société donnée est une démarche importante pour mener à bien une évaluation neuropsychologique dans un contexte d’interculturalité. Pour comprendre un événement neurologique sur la cognition, le comportement voir sur les relations familiales, nous devons comprendre qui est l'individu dans le contexte de sa culture. La mise en place d’un contexte culturellement approprié est donc fondamentale pour conceptualiser des comportements ou interpréter des données dans une perspective ethnorelative. La présente communication vise à apporter des pistes sur les prérequis essentiels pour mener à bien une évaluation neuropsychologique dans un contexte d’interculturalité. Plus spécifiquement, nous nous focalisons ici sur la clinique de l’évaluation qui, en s’inscrivant dans une situation sociale, est de fait régie par des règles culturelles pas forcément universelles.
Mots clés : neuropsychologie interculturelle ; évaluation ; clinique ; perspective ethnorelative.